Preuve numérique fiable : le papier peut disparaître

Le droit de la preuve a été réformé par l’ordonnance du 10 février 2016. C’est désormais le nouvel article 1379 du Code civil, entré en vigueur le 1er octobre 2016, qui définit le régime probatoire de la copie d’un acte. Il pose le principe que la copie « fiable » d’un écrit a la même force probante que son original et que la copie est présumée fiable lorsqu’elle répond à certaines conditions. Le décret devant préciser les modalités techniques du procédé permettant de présumer cette fiabilité est publié.

Une copie numérique présumée « fiable »

Rappelons qu’avant la réforme, la validité de l’écrit sous forme électronique était déjà reconnue. Il était admis en preuve au même titre que l’écrit papier sous réserve que la personne dont il émanait puisse être identifiable et que l’intégrité du document fut garantie (c. civ. art. 1316-1 ancien). Mais la copie électronique d’un document ne faisait foi que lorsque l’original existait toujours et qu’il était susceptible d’être produit en preuve (c. civ. art. 1334 et 1335 anciens).

Depuis le 1er octobre 2016, date d’entrée en vigueur de la réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations (ordonnance 2016-131 du 10 février 2016, JO du 11), la copie « fiable » d’un écrit a la même force probante que son original, et ce, indépendamment de l’existence ou non d’un original. L’évaluation du critère de fiabilité de la copie est laissée à l’appréciation du juge.

Cependant, l’article 1379 du Code civil introduit deux présomptions de fiabilité. La première, irréfragable du fait de son auteur, concerne la copie exécutoire ou authentique d’un écrit lui-même authentique. La seconde, qui est simple, vise, jusqu’à preuve du contraire, toute copie résultant d’une reproduction à l’identique de la forme et du contenu de l’acte, et dont l’intégrité est garantie dans le temps par un procédé conforme à des conditions fixées par décret en Conseil d’État (c. civ. art. 1379).

Ce décret vient d’être publié. Il permet ainsi l’utilisation de ce mode de preuve à compter du 7 décembre 2016.

Une copie numérique fidèle et durable

Informations préalables

Le procédé de reproduction par voie électronique doit produire des informations liées à la copie et destinées à l’identification de celle-ci. Le contexte de la numérisation, en particulier la date de création de la copie, doit être précisé. La qualité du procédé doit être établie par des tests sur des documents similaires à ceux reproduits et vérifiée par des contrôles (décret 2016-1673 du 5 décembre 2016, art. 2).

Empreinte électronique et horodatage nécessaires

L’intégrité de la copie résultant d’un procédé de reproduction par voie électronique est attestée par une empreinte électronique qui garantit que toute modification ultérieure de la copie à laquelle elle est attachée est détectable. Cette condition est présumée remplie par l’usage d’un horodatage qualifié, d’un cachet électronique qualifié ou d’une signature électronique qualifiée, au sens du règlement (UE) n° 910/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur (décret précité, art. 3).

Conservation de la copie électronique

La copie électronique doit être conservée dans des conditions propres à éviter toute altération de sa forme ou de son contenu. Les opérations requises pour assurer la lisibilité de la copie électronique dans le temps ne constituent pas une altération de son contenu ou de sa forme dès lors qu’elles sont tracées et donnent lieu à la génération d’une nouvelle empreinte électronique de la copie (décret précité, art. 4).

Les empreintes et les traces sont conservées aussi longtemps que la copie électronique produite et dans des conditions ne permettant pas leur modification (décret précité, art. 5).

Une documentation doit décrire l’ensemble du procédé de reproduction décrit ci-dessus. Elle est conservée aussi longtemps que la copie électronique produite (décret précité, art. 7).

L’accès aux dispositifs de reproduction et de conservation doit également faire l’objet de mesures de sécurité appropriées (décret précité, art. 6).

Un archivage facilité avec la possibilité de détruire le papier

Le rapport au Président de la République relatif à l’ordonnance du 10 février 2016 indiquait qu’il importait peu que l’original subsiste ou pas, et qu’il importait peu l’origine, le cas échéant, de la disparition de l’original.

L’article 1379 du Code civil précise que si l’original subsiste, sa présentation peut toujours être exigée par le juge. Mais sa subsistance ne conditionne plus la valeur probatoire de la copie.

Une partie ne peut donc plus se voir contrainte de fournir une preuve papier lorsqu’elle a numérisé au préalable le document en cause dans les conditions requises et qu’elle produit cette copie.

NB : On peut noter que l’ordonnance du 10 février 2016 n’ayant pas retenu la distinction entre les termes d’acte et écrit, ces dispositions relatives à la copie sont applicables à la preuve d’un fait juridique.

Décret 2016-1673 du 5 décembre 2016, JO du 6

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